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Impact Investors

Comment pallier le manque d'informations sur les financements alternatifs en économie verte pour les entrepreneurs en Tunisie?

Au cours de la mission GIIN, seules quelques initiatives développées par des institutions bancaires non commerciales liées à l'économie verte ont été détectées et les entrepreneurs ne semblent pas les connaître. Comment couvrir ce manque d'informations sur les financements alternatifs pour l'économie verte en Tunisie? Katia Mehanneche s'est penché sur la question. Voici son analyse!

Depuis 2011, l’environnement économique en Tunisie a beaucoup évolué. En effet, les évènements sociaux ont mis en évidence le niveau important de chômage en particulier chez les jeunes et levé le voile sur une situation de grande pauvreté. La lutte contre le chômage est depuis devenue une priorité nationale au travers notamment du développement des régions et des mesures d’appui à la création d’emplois, à l’entrepreneuriat, à la formation des jeunes et au financement de projets.

Dans ce contexte, le microcrédit est apparu comme un vecteur essentiel du financement des petits projets. Une refonte des textes règlementaires a permis d’introduire la notion nouvelle en Tunisie de microfinance et de proposer de nouveaux services. Aujourd’hui, le secteur du microcrédit compte 6 institutions, dont une institution de microcrédit islamique, et environ 150 associations qui offrent du microcrédit dans des régions reculées.

D’autres dispositifs de financement sont apparues après 2011 au travers notamment d’associations créées sur le modèle de structures existantes en France, comme le Réseau Entreprendre ou le réseau Initiative France, qui proposent à des créateurs et des repreneurs d’entreprise en Tunisie des prêts d’honneur associés à un accompagnement spécifique. De nombreuses plateformes de coworking ont également vu le jour comme Cogite, Dar El Harka, El Space etc offrant des solutions d’accompagnement qui complétent l’ecosystème de l’entrepreneuriat en Tunisie. Une seule plateforme, Flat6Lab, propose un espace de travail, un accompagnement, des formations mais aussi un financement en fonds propres.

 

 

Ces dispositifs répondent à un besoin de financement et d’accompagnement de projets que la finance traditionnelle au travers des banques et des fonds d’investissement n’arrive pas à financer, soit car les montants sont trop faibles et ne permettent pas de rentabiliser l’intervention, soit en raison d’un risque estimé trop élevé, ou méconnu.

L’ensemble de ces nouvelles solutions de financement qui associent accompagnement et financement ne sont pas dédiées à un secteur d’activité en particulier. Pour mieux identifier les structures dédiées spécifiquement aux projets de la green economy, SwitchMed, qui offre notamment une assistance technique aux projets d’innovation économique et sociale au travers d’un réseau de partenaires dans huit pays de la région MENA, a lancé en Mai 2016 une étude en Tunisie afin d’identifier les dispositifs de financement du secteur.

Cette étude a permis de constater que la green economy n’est pas en Tunisie un secteur qui bénéficie de structures de financement adhoc. Le risque élevé et la technicité de ces types de projet rendent difficile leur étude et leur financement. Ces projets nécessitent par ailleurs un apport au démarrage pour des études préalables, des brevets et autres actifs immatériels qui sont difficilement finançables par de la dette ou des fonds propres.

Une réflexion sur le lancement d’un produit dédié à ce type de projet pourrait être lancée afin de proposer un dispositif qui offrirait un financement au démarrage sous forme de subvention ou de fonds propres, adossé à une garantie pour minimiser le risque pour l’investisseur, et associé à un accompagnement technique pour sécuriser l’avancement du projet. Cet outil agirait comme un effet de levier pour faciliter l’obtention de financements classiques.

Par ailleurs, les porteurs de projet ne sont pas sensibilisés aux dispositifs existants. Afin d’y remédier, il pourrait être utile de créer un outil, sous la forme d’une cartographie ou d’un site internet, permettant de regrouper l’ensemble des dispositifs existants, qu’il soient publics ou portés par des initiatives privées, qu’il s’agisse d’accompagnement, d’assistance technique ou de facilitation du financement.

Cet outil serait un guide à l’usage de l’entrepreneur afin de l’informer de ce qui existe, de l’aider à comprendre le processus de financement de son projet, et de l’orienter vers la meilleure solution en fonction de la typologie de son projet. L’objectif de cet outil serait finalement de sortir l’entrepreneur de son isolement en le mettant en relation avec les acteurs utiles pour son projet, permettant de créer de la confiance et une compréhension mutuelle. Il pourrait être diffusé au travers des structures d’appui et de financement, mais également au travers des universités, des écoles d’ingénieur, des structures de formation, des bureaux d’emploi répartis dans les régions ou dans les bureaux de la Poste qui dispose d’un réseau de couverture dense du territoire, suscitant ainsi de nouvelles ambitions de projets.

Enfin, la Tunisie dispose d’un potentiel important en matière de développement de projets de la green economy compte tenu de son ecosystème naturel riche. Un recensement de ces projets au travers de la réalisation d’une étude de potentiel pourrait faciliter le financement et l’appui de ces projets en sensibilisant davantage les autorités et les bailleurs internationaux sur le vivier de création d’emplois dans ce secteur.

Katia Mehanneche Consultante en finance inclusive, Katia Mehanneche a une expérience dans le financement de projets d'entreprises, TPME et PME, dans le secteur privé en France. Elle est aussi experte en financement de banques privées et en appui au secteur de la microfinance et de l'inclusion financière auprès de bailleurs de fonds en Tunisie. Pour plus d’information visitez son profil Linkedin .